Que signifie prendre des marges de sécurité ?
Les marges de sécurité sont systématiques dans la chirurgie du cancer de la peau.
On appelle marges de sécurité les marges supplémentaires que l’on prend tout autour du cancer lorsqu’on réalise son exérèse chirurgicale. Ces marges de sécurité sont dessinées à partir des bords visibles du cancer de la peau.
Elles peuvent varier de quelques millimètres à plusieurs centimètres en fonction du type de cancer de la peau.
Ces marges sont obligatoires pour maximiser la probabilité d’exérèse complète d’une part et diminuer le risque de récidive locale d’autre part.
La chirurgie du cancer de la peau est une intervention de chirurgie dermatologique effectuée par le chirurgien dermatologue. Elle peut être réalisée directement au centre, le même jour que la consultation.
Pourquoi prendre des marges de sécurité lorsqu’on retire un cancer de la peau ?
L’objectif des marges de sécurité est double :
- Augmenter les probabilités d’exérèse complète du cancer. En effet, les limites réelles (microscopiques) du cancer de la peau sont parfois plus étendues que les limites visibles à l’oeil nu. En prenant des marges de sécurité tout autour du cancer de la peau, on augmente ainsi la probabilité d’enlever d’emblée la totalité du cancer. C’est l’analyse histologique (au microscope) qui confirme le caractère complet de l’exérèse.
- Diminuer le risque de récidive du cancer. Les marges de sécurité permettent d’emporter de la peau à distance du cancer qui pourraient contenir des cellules cancéreuses. Cela est particulièrement important pour le carcinome épidermoïde et pour le mélanome, qui disséminent facilement à distance du foyer initial. En effet, ces tumeurs peuvent présenter des structures discontinues. De ce fait, si les marges sont insuffisantes, l’exérèse apparemment complète passe en réalité entre deux foyers tumoraux. Cela peut être également le cas pour des tumeurs à structure continue lorsque l’analyse histologique n’a pas examiné la totalité des marges.
Comment sont déterminées ces marges de sécurité ?
Les marges de sécurité recommandées dépendent du type de cancer de la peau : carcinome basocellulaire, carcinome épidermoïde ou mélanome.
Carcinome basocellulaire
Les carcinomes basocellulaires (CBC) sont classées en 3 groupes en fonction de leur pronostic (risque de récidive). Ce pronostic est fonction du type clinique du CBC (superficiel, nodulaire, sclérodermiforme), de sa taille, de sa localisation sur le corps et de son caractère récidivant ou non.
On distingue ainsi :
- Le groupe de mauvais pronostic (risque élevé de récidive locale) : CBC sclérodermiforme ou mal limité, CBC récidivant, CBC nodulaire situés sur le nez et les zones péri-orificielles sur le visage et de taille supérieure à 1 cm.
- Le groupe de bon pronostic (risque faible de récidive locale) : CBC superficiel, CBC nodulaire bien limité de moins de 1 cm sur le visage en dehors du nez ou des zones péri-orificielles, ou bien de moins de 2 cm au niveau du tronc ou des membres.
- Le groupe de pronostic intermédiaire : CBC superficiel récidivant, CBC nodulaire de moins de 1 cm sur le nez et les zones péri-orificielles, de plus de 1 cm sur le visage en dehors du nez et des zones péri-orificielles, de plus de 2 cm au niveau du tronc ou des membres.
Les marges de sécurité vont dépendre du groupe pronostic auquel appartient le CBC :
- Pour le groupe de mauvais pronostic : on recommande des marges de sécurité de 5 à 10 mm.
- Pour le groupe de bon pronostic : on préconise des marges de sécurité de 3 à 4 mm.
- Pour le groupe de pronostic intermédiaire : on conseille des marges de sécurité de 4 mm au minimum.
Carcinome épidermoïde
Les marges de sécurité dépendent surtout de la taille du carcinome épidermoïde :
- Pour un carcinome épidermoïde de moins de 2 cm, on recommande des marges de 4 à 6 mm.
- Pour un carcinome épidermoïde de plus de 2 cm, on préconise des marges de 6 à 10 mm.
Mélanome
Le principal facteur pronostic d’un mélanome est l’indice de Breslow.
L’indice de Breslow correspond à l’épaisseur du mélanome. Il est mesuré par le médecin pathologiste au laboratoire. Il est défini comme la distance verticale entre la couche supérieure de la peau (l’épiderme) et la partie la plus profonde de la tumeur. Cette distance est mesurée en millimètres.
L’indice de Breslow va déterminer les marges de sécurité que l’on va devoir prendre lors de la chirurgie de reprise :
- Mélanome in situ : marges de 0.5 cm.
- Breslow < 1 mm : marges de 1 cm.
- Breslow entre 1 mm et 2 mm : marges de 1 à 2 cm.
- Breslow > 2 mm : 2 cm.
Une fois la biopsie-exérèse réalisée, la reprise des marges autour de la cicatrice est systématique. Elle varie donc entre 0.5 cm (pour un mélanome in situ) à 2 cm (pour un mélanome invasif dont l’indice de Breslow est supérieur à 2 mm).
Comment faire pour limiter le préjudice esthétique secondaire à ces marges de sécurité ?
Prendre des marges de sécurité autour du cancer de la peau augmente la quantité de peau qui doit être retirée.
Cela a pour conséquence d’agrandir la perte de substance et donc d’allonger la cicatrice lorsque la suture directe est réalisée. Nous nous attachons en tant que chirurgiens plasticiens à réaliser les cicatrices les plus discrètes possibles, notamment en plaçant les cicatrices dans des plis naturels.
Lorsque la suture directe n’est pas possible, un geste de chirurgie réparatrice doit être effectué. Ce geste doit être réalisé par un chirurgien expérimenté rompu aux techniques modernes de la chirurgie plastique.